Ce qu’on respire sur Tatouine

Auteur: Jean-Christophe Réhel.

Ce qu’on respire sur Tatouine, de Jean-Christophe Réhel, aborde les thèmes de la maladie et de la solitude à travers les yeux d’un narrateur atteint de fibrose kystique, qui n’est pas plus charmant que sa maladie. Le lecteur assiste à sa lente déchéance en suivant son rejet progressif de toute relation humaine. Travaillant tour à tour dans un bureau de renseignements touristiques, un magasin de chaussures et un super C, passant d’un appartement à une chambre de sous-sol de Repentigny, nécessitant l’aide de sa petite sœur new-yorkaise sans cesse, le narrateur se dégage peu à peu du monde des adultes. L’irresponsabilité dont il fait preuve, rappelant l’adolescence, le pousse à prendre de mauvaises décisions, comme acheter un masque d’Halloween plutôt que de payer son loyer, ou vomir un surplus de crème de menthe sur les murs d’une chic maison américaine. Plus la maladie prend de l’ampleur, plus le personnage semble incapable de prendre sa vie en main et devient négligent. Ainsi, des symptômes inquiétants, tels des crachats ensanglantés, sont relégués au second plan de ses préoccupations.

L’auteur nous offre certes une vision intéressante d’une maladie qui, bien que connue, nous reste mystérieuse. Toutefois, son personnage manque de mordant, il nous manque quelque chose à quoi nous accrocher pour nous permettre d’apprendre à l’aimer. Par ailleurs, Ce qu’on respire sur Tatouine est comme la grotte d’Ali Baba avec une quantité impressionnante de références à la culture populaire, de Star Wars à Rihanna, en passant par les White Stripes. On ne peut qu’applaudir l’auteur pour son habileté, bien que la culture québécoise manque à l’appel. Les liens étranges apportés par ces références nous permettent au moins de nous amuser à certains moments: «Je suis Mystique, j’enlève ma jaquette, je me transforme en Leonardo DiCaprio. » Tous ces clins-d’oeil, combinés à l’humour de Réhel et aux phrases très brèves, voire infantiles, donnent au récit un débit rapide et permettent une lecture aisée sur un thème aussi sombre que la fibrose kystique. Par contre, cet humour a ses limites. Voir le narrateur s’imaginer être George Clooney alors qu’il se fait observer le postérieur est certes hilarant, mais pour que ça le reste, il aurait fallu que l’auteur utilise cette technique avec parcimonie.

Malgré un personnage piteux et des événements répétitifs, le récit est bien tissé. Réhel nous offre une vision originale d’une maladie dont on entend le nom de plus en plus souvent. Le lecteur devra cependant rester bien éveillé pendant la lecture, sinon il peut rapidement se perdre dans la multiplication des références culturelles.

Par Léa Hétu et Valérie Lajeunesse